Découverte du dépôt de fondation du couvent des Capucins de Quimperlé
Une équipe d’archéologues de l’Inrap met actuellement au jour l’ancien couvent des Capucins, au cœur de la ville de Quimperlé, en Sud-Finistère (Bretagne). Réalisée sur prescription de l’État (Drac Bretagne), cette fouille précède l’aménagement du futur conservatoire de musique et de danse réalisé par Quimperlé Communauté. Aujourd’hui, ils viennent d’exhumer un étonnant vestige : le dépôt de fondation de ce couvent.
Un couvent des Capucins, édifice méconnu
Implanté en haute ville, à 200 m de l’ancienne église paroissiale Saint-Michel, l’ancien couvent des Capucins est fondé en 1653, puis détruit au cours du XIXe siècle. Entre 1656 et 1667, Mathurin Grellepoix de Hennebont dirige les travaux de l’édifice. Celui-ci se compose d’un bâtiment allongé auquel s’adjoignent deux pavillons d’angles. Dans le pavillon sud, est érigée une chapelle. En 1793, l’ensemble est vendu comme Bien National et acquis, en 1834, par la ville de Quimperlé. Le couvent devient alors un collège communal. Son histoire s’avère fort peu connue, seuls un plan incomplet des bâtiments et une vue cavalière partielle datée de 1737 sont parvenus jusqu’à nous.
Depuis mai et jusqu’à début septembre 2022, les archéologues de l’Inrap exhument les fondations de ce cloître méconnu, son puits et le cimetière du couvent, composé d’une douzaine de sépultures. La moitié sud de la fouille de 800 m2 est également très dense en vestiges, avec de nombreux murs, des sols en pierre…
Découverte du dépôt de fondation
Dans le cimetière, face à la chapelle, le dépôt de fondation du couvent vient d’être mis au jour. Celui-ci se compose de deux blocs de granit, posés l’un sur l’autre et scellés au mortier. Une croix gravée est présente sur le haut de la pierre composant le couvercle. Entre le socle et le couvercle de granit, une plaque de plomb a été insérée dans un interstice aménagé. Cet élément carré (26 x 26,7 cm) comporte un texte gravé, actuellement en cours d’étude. Celui-ci évoque la pose de « la première pierre dans les fondations de l’église » en mai 1654, et donne ainsi un précieux éclairage sur les origines du couvent :
AD MAJOREM DEI GLORIAM,
Innocentio Xo, summo pontifi[ce],
Renaio du Louet, episcopo Cori[sopitensi],
regnante Ludovico XIIII, dominus de
[—]snoe, nomine ducis de La Melleraie,
marescali Franciae, et in provinci[a]
Britanniae pro regis, hunc primarium
lapidem posuit in fundamentis ecclesiae
conventus capucinorum Quimperl[—],
die Ia maii anni MDCLIIII

Détail du texte de la plaque de plomb découverte à l’intérieur du dépôt de fondation relatant la pose de la première pierre du couvent. © Marie Millet, Inrap.
La formule rend tout d’abord gloire à Dieu, puis le texte évoque le pape, Innocent X, l’évêque, René du Louët de Coëtjunval, et le roi Louis XIV. La personnalité ayant posé la première pierre de l’église est mentionnée. Toutefois, son nom s’avère difficile à identifier, puisqu’en l’absence des premières lettres de la cinquième ligne, seule figure la mention « seigneur de ….snoe ». Celui-ci agit au nom du « duc de La Meilleray, maréchal de France », c’est-à-dire Charles de La Porte, gouverneur de Bretagne.
Déjà attestée en Mésopotamie et en Égypte anciennes, le dépôt de fondation est une pratique qui perdure de nos jours et consiste à placer sous la première pierre d’un nouvel édifice un texte commémoratif ou une série d’objets. En 2016, dans le faubourg de Villefranche, les archéologues de l’Inrap avaient déjà exhumé un coffre monolithe, d’environ 300 kg. À l’intérieur était enchâssée une plaque de plomb relatant la pose de la première pierre du couvent des franciscains réformés, dits « Récollets », par l’évêque de Montpellier, en 1664. Hormis ces dépôts de fondation conventuelle, les archéologues de l’Inrap ont aussi mis en évidence en 2019 une plaque de cuivre commémorative, datée de 1859, provenant d’une colonne de la Renaissance du cimetière de l’Aître Saint-Maclou à Rouen.
Sous le couvent, le Faubourg de Porsambars révélé
Il était traditionnellement admis que ce couvent s’était implanté dans une zone inhabitée de la ville. Or, la fouille remet en question cette hypothèse et met en lumière une occupation antérieure à l’édifice religieux. Cours pavées, murs parcellaires et constructions en pierre sont en cours de dégagement par les archéologues. Leur étude permettra de comprendre l’organisation et la fonction de ces bâtiments antérieurs au XVIIe siècle et éclairera les prémisses de ce faubourg de Porsambars, aujourd’hui au cœur de Quimperlé.
2002-2022 : l’Inrap a vingt ans !
L’Institut national de recherches archéologiques préventives est un établissement public placé sous la tutelle des ministères de la Culture et de la Recherche. Il assure la détection et l’étude du patrimoine archéologique en amont des travaux d’aménagement du territoire et réalise chaque année quelque 1800 diagnostics archéologiques et plus de 200 fouilles pour le compte des aménageurs privés et publics, en France métropolitaine et outre-mer. Ses missions s’étendent à l’analyse et à l’interprétation scientifiques des données de fouille ainsi qu’à la diffusion de la connaissance archéologique. Ses 2 200 agents, répartis dans huit directions régionales et interrégionales, 42 centres de recherche et un siège à Paris, en font le plus grand opérateur de recherche archéologique européen. Créé le 1er février 2002 en application de la loi sur l’archéologie préventive de janvier 2001, l’Institut célèbre ses vingt ans d’existence, de recherches et de découvertes archéologiques.
- Vue zénithale de la fouille de la place des écoles à Quimperlé. © Emmanuelle Collado, Inrap.
- Vue générale de la fouille de la place des écoles à Quimperlé. © Emmanuelle Collado, Inrap.
- Détail du texte de la plaque de plomb découverte à l’intérieur du dépôt de fondation relatant la pose de la première pierre du couvent. © Marie Millet, Inrap.
- Vue du dépôt de fondation lors de sa découverte. © Marie Millet, Inrap.
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