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novembre 2020

Jours de fête il y a 2800 ans ?

Premiers résultats des fouilles archéologiques à Corbas, Les Grandes Verchères

C’est au nord de Corbas (69) que cinq archéologues d’Archeodunum ont réalisé une fouille  préalablement à un projet immobilier. L’équipe est intervenue en juin et juillet 2020, sur 2 500 m². La découverte principale est un ensemble de six imposants foyers, ultimes vestiges d’un ou de plusieurs repas collectifs, qui se sont tenus il y a environ 2 800 ans.

Fig. 1 : Alors que le décapage est toujours en cours, la fouille des foyers débute. © Archeodunum 2020.

Fig. 1 : Alors que le décapage est toujours en cours, la fouille des foyers débute. © Archeodunum 2020.

 

Un projet de construction à l’origine de la fouille archéologique

La fouille s’est inscrite dans la cadre du projet de construction O’VOL, porté par la société Alila. L’instruction du dossier a déclenché un diagnostic archéologique sur 5 500 m². à la suite de résultats positifs, le Service régional de l’archéologie a prescrit la fouille de 2 500 m² (fig. 1)

Ce qui était attendu : des vestiges de l’âge du Bronze

Des vestiges de la fin de l’âge du Bronze et du début de l’âge du Fer (vers 800 av. J.-C.) étaient déjà connus dans le secteur. Le diagnostic préalable a confirmé cette présence, avec de nombreux fragments de poteries et, surtout, deux grands foyers rectangulaires. Si aucune trace d’habitations n’a été détectée aux alentours, cela restait un point à examiner.

Des foyers alignés, au milieu de nulle part ?

La fouille a duré quatre semaines. L’équipe, dirigée par Clément Moreau, a découvert quatre grands foyers supplémentaires, pour un total de six foyers (fig. 2). Fait remarquable, ces six structures sont situées sur une même ligne, orientée nord-sud. En revanche, peu d’indices du contexte dans lequel ils s’insèrent : de nombreux fragments de céramique, mais pas de bâtiment attesté.
De telles batteries de foyers de ce type ne sont pas rares à la fin de l’âge du Bronze, ou à des époques plus anciennes. Il arrive souvent qu’elles soient situées à l’écart de tout aménagement domestique, dans des confins.

Fig. 2 : Les six foyers. © Archeodunum 2020.

Fig. 2 : Les six foyers. © Archeodunum 2020.

 

Fig. 3 : Fouille en cours de l'alignement de foyers. © Archeodunum 2020.

Fig. 3 : Fouille en cours de l’alignement de foyers. © Archeodunum 2020.

 

 

Un peu de Polynésie à Corbas

Un autre élément frappant est la construction standardisée des foyers. Fosses de 2 m x 1,20 m, restes de bûches carbonisées sur le fond, surmontées d’une couche de galets ayant chauffé (fig. 3, 4, 5 et 6). Au total, c’est près de 1,5 tonne de galets qui était conservée dans les six fosses.
Ce type de foyer est bien connu en archéologie. On le qualifie de « four polynésien », en référence à un dispositif de cuisson encore très fréquent en Polynésie, où il est nommé ahi ma’a. Le principe est une cuisson à l’étouffée. Le feu en fond de fosse chauffe les pierres qui deviennent brûlantes. On y dépose alors la nourriture, que l’on recouvre de branchages et de terre, et qu’on laisse cuire pendant plusieurs heures.

 

Fig. 5 : La fosse d’un foyer, avec les bords rougis par le feu et la couche charbonneuse qui apparaît sous les galets. © Archeodunum 2020.

Fig. 4 : Dégagement des galets d’un foyer. © Archeodunum 2020.

Fig. 5 : La fosse d’un foyer, avec les bords rougis par le feu et la couche charbonneuse qui apparaît sous les galets. © Archeodunum 2020.

Fig. 5 : La fosse d’un foyer, avec les bords rougis par le feu et la couche charbonneuse qui apparaît sous les galets. © Archeodunum 2020.

 

Fig. 6 : Sous les galets, les bûches et les charbons. © Archeodunum 2020.

Fig. 6 : Sous les galets, les bûches et les charbons. © Archeodunum 2020.

 

 

 

Quelle occasion, quels convives, quel menu ?

Un seul des foyers de Corbas suffit à nourrir un groupe nombreux. Comme on les a vraisemblablement allumés de concert, il est donc séduisant d’imaginer que les six fours aient servi dans des circonstances exceptionnelles (rassemblement, cérémonie, fête, mariage, etc.), qui resteront hélas dans l’ombre.
Qu’y a-t-on mangé ? Isolée à 15 mètres au sud, une jeune vache a été enterrée entière (fig. 7). Outre le fait que l’absence de découpe ne soit guère compatible avec le fonctionnement des foyers, on ne peut pour l’instant pas dire si l’animal en est contemporain. En revanche, par des analyses chimiques des résidus sur les pierres issues des foyers, on tentera d’identifier les restes des aliments réellement consommés.

 

Fig. 7 : Jeune vache enterrée plus au sud (ne manque que le haut du crâne). © Archeodunum 2020.

Fig. 7 : Jeune vache enterrée plus au sud (ne manque que le haut du crâne). © Archeodunum 2020.

 

La suite des événements

Sur place, le terrain est désormais disponible pour la suite des aménagements. En souvenir des festins de l’âge du Bronze, un barbecue collectif y sera-t-il aménagé ?
Côté archéologie, les investigations se poursuivent en laboratoire. Les spécialistes d’Archeodunum exploitent les informations recueillies sur le terrain (Fig. 8). Pendant plusieurs mois, une quinzaine de personnes vont se relayer pour décrire et analyser au mieux les vestiges. Hormis les analyses chimiques déjà évoquées, on s’intéressera aux bois brûlés, à la fois pour les dater et pour connaître l’environnement boisé du site. Tous les résultats seront synthétisés dans un rapport final abondamment documenté et argumenté.

 

Fig. 8 : Prélèvement en cours des galets. © Archeodunum 2020.

Fig. 8 : Prélèvement en cours des galets. © Archeodunum 2020.

 

 

Source : http://www.archeodunum.com/corbas-2020/